Son premier souvenir était déjà cette maudite falaise Plongeant dans la mer, emportant avec elle l’avenir Assis sur le bord avec ses jambes dans le vide Il a pa**é toute sa vie à guetter le retour des navires A son tour, bientôt lui aussi sera emporté par la mer Il rêve lui aussi de se faire emporter par la mer Mais sa mère lui a dit « Reste ! Tu es bien trop jeune ! Souviens-toi seulement d’la façon dont la mer a pris ton père » Il sait parfaitement que l’océan éteindra son cœur Mais pour lui chaque jour sur terre est synonyme de prison ferme Il veut lever l’ancre, être libre, car sa vie lui semble plutôt tiède Il veut bruler vif et voir les vagues le monter jusqu’au ciel Il veut répondre à l’appel que chante l’aube Quitte à revenir chez lui capitaine d’un vaisseau fantôme A son tour, bientôt lui aussi sera emporté par la mer A son tour, bientôt lui aussi sera emporté par la mer Il hurle, espère, rôde comme un esprit damné Chaque minute il se répète « c’est bientôt l’moment d’y aller » Posté sur la plage, il ne veut pas rentrer Il s’amuse dans les entrailles de vieux navires éventrés Il est trop occupé, chaque seconde, il cherche à recruter son équipage Mais le vent ne lui renvoie que d’insipides compliments A qui le suivra, il promet l’Univers en héritage D’inestimables trésors venus d’invisibles continents Ensemble, ils hisseront les voiles, très loin de ce pays sombre Ensuite ils suivront l’étoile, mais jamais ne vieilliront Guidés pas le son des astres, aux sirènes obéiront Veulent affronter Léviathan puis défier Poséidon Chanter dans les pires tempêtes Aller là ou personne n’a plus peur du temps Partir à tout jamais devenir sans terre Et accepter que l’eau ait la couleur du sang Il a pris la mer Comme il le rêvait Il a pris la mer Comme son père et ses frères Il a pris la mer Oui. Qui l’en a empêché ? Il a pris la mer Il a pris la mer Qui l’en a empêché ? Hein ? Vous ? Qui êtes toujours lâchement restés sur la terre ? Il rêvait d’être emporté par la mer Il rêvait d’être emporté par la mer