Quand l'aube se prend pour Matisse Quand les papillons se déplissent Comme la fleur du grenadier Quand le premier soleil fragile Frappe aux volets clos de la ville Un à un pour les réveiller Quand le premier cheval qui trotte A de la fumée sous les bottes De la terre sous les souliers J'ouvre les yeux et je te vois J'ouvre les yeux et je te crois J'ouvre les yeux et c'est pour toi Que je veux vivre, mon amour Quand midi se prend pour Cézanne Qu'il met du vent dans les platanes Et du bleu dans les oliviers Quand tous les troupeaux s'effarouchent Que la chaleur les prend, les couche A l'ombre maigre d'un figuier Quand toutes les rues sont désertes Que nulle n'offre une place verte Un refuge, une ombre, un sentier J'ouvre les yeux et je te vois J'ouvre les yeux et je te crois J'ouvre les yeux et c'est pour toi Que je veux vivre, mon amour Quand le soir bleuit ses falaises Comme une estampe japonaise Comme un Renoir, comme un Manet Quand le soleil vibre, chavire Dans l'océan et qu'il s'étire Comme un éventail déplié Lorsque tout se métamorphose Et que seul le parfum des roses Continue de s'exaspérer J'ouvre les yeux et je te vois J'ouvre les yeux, je tends les bras J'ouvre les yeux et c'est pour toi Que je veux vivre, mon amour Mon amour...