(Texte librement inspiré du film "Les Fantômes" de Jean-Teddy Filippe) Comme convenu le fils du soldat inconnu m'a rejoint à la sortie de la ville Il a enfin accepté de m'accompagner chez ceux que l'on ne nomme pas Il ne veut pas que je le filme Il a longuement parlé à ma vieille voiture en lui disant que nous allions faire un long voyage mais qu‘elle n'irait pas jusqu'au bout avec nous et qu'il fallait qu'elle nous pardonne Voilà 2 jours que nous sommes partis, le fils du soldat inconnu a accepté la caméra depuis que je lui ai a**uré que ce film ne sera vu qu'une fois que l'un de nous deux sera mort Il me dit qu'il ne sera jamais tout à fait mort Puis il me dit que son père vivait au bord de l'autre monde Il n'a pas voulu m'en dire plus Il me raconte aussi que là où habite son père il y'avait un village et puis il y'a eu la grande guerre, elle a effacé les routes, les hommes se sont perdus et le désert a avalé les maisons vides Le désert est toujours le plus fort Il répète le désert est toujours le plus fort Nous arrivons chez son père Il m'explique que son père est né un peu après le début du monde et qu'il est fatigué Il me dit aussi qu'il n'est jamais surpris par ses visites car il les rêve toujours 3 ou 4 jours à l'avance Le fils du soldat inconnu me demande de l'attendre devant la cabane Je l'attend dans ma voiture Je fixe la porte de la baraque, les heures défilent et je m'endors Là je fais un drôle de rêve… Dans un coin de la maison, le fils du soldat inconnu semble traduire sa colère en lançant des couteaux vers un vieux chien qui pourrait bien être son pauvre père A l'intérieur de la volière ses oiseaux son devenus des souris Paniqué, je ressors de la maison et vois le village tel qu'il devait être dans le pa**é A tous les coins de rue le même mime me fait des signes A ses côtés une statue est ligotée pendant qu'un pendu part se désaltérer La soif me réveille. Ma gourde est vide. Je décide alors de rentrer dans la cabane pour demander de l'eau Le fils du soldat inconnu ouvre la porte et me présente aussitôt à son père qui me dit que je suis trop fragile pour les esprits du désert Puis il m'explique que si le 2ème jour on croise un chien qui sur le chemin va de la gauche vers la droite il nous faudra suivre sa direction Si le 3ème jour un arc en ciel rouge sang apparaît au dessus de nos têtes il nous faudra aussitôt s'a**eoir et se recroqueviller jusqu'à ce qu'il disparaisse Si la 4ème nuit un vent glacial nous réveille c'est qu'ils voudront nous éprouver et qu'ils ont demandé à la mort de nous éventer avec son voile Le 5ème jour ils nous montreront peut-être quelque chose peut-être rien du tout, ils ont une grande puissance mais ce qu'ils font n'est plus de notre monde Il sourit, pose sa main sur mon épaule et puis s'en va Le lendemain nous entrons dans le pays où il pleut de pierres, il ne faudra pas parler de toute la journée en effet parce qu'aucune parole n'est juste, ils capturent les paroles pour les enfoncer dans la terre Une fois la terre blessée par les paroles qui portent la folie, elle se venge des hommes la nuit et les effraye en parlant toute seule Il n'a pas voulu m'en dire plus 2ème jour du voyage nous venons de croiser un chien, il nous faudra suivre sa direction J'ai du mal à croire qu'il faille suivre un chien Le fils du soldat inconnu me dit que ce n'était pas qu'un chien Le 3ème jour l'arc en ciel se dessine au dessus de nous Nous restons dans la pose que nous avait montré le père pendant plus de 3 heures De l'autre côté commence le pays de ceux que l'on ne nomme pas Soudain je me rends compte que tout s'était pa**é comme son père nous l'avait dit Je suis plus impressionné que je ne le laisse paraître Il me dit qu'ils peuvent se déplacer très vite car parfois ils sont vraiment là, d'autres fois ce ne sont que des rêves Il ne veut pas m'en dire plus. Il pense que nous n'aurons plus longtemps à attendre Tôt ce matin une silhouette qui ressemblait au mime de mon rêve est apparue sur le rocher Devant moi elle a foncé vers la paroi pour réapparaître au même instant 500 mètres plus loin Le fils du soldat inconnu m'a murmuré qu ‘elle se déplaçait avec le rêve Je ne croyais pas ce que je filmais Ce soir mon ami m'a demandé d'apparaître avec lui sur le film J'ai un pressentiment mais je refuse de l'admettre Le lendemain matin, le 5ème jour, 2 silhouettes sont apparues au moment même où j'ai vu le fils du soldat inconnu sur le rocher, il m'a murmuré que le temps n'était qu'un illusion Au même instant, je l'ai retrouvé son oreille sur mon c½ur, il me dit que bien qu'ayant la réputation d'être vivant j'étais déjà mort J'ai rouvert les yeux mais il n'était plus là J'ai filmé par réflexe… Quand je suis revenu sur le rocher il était déjà vide Je les ai alors cherché là où la veille j'avais vu la silhouette du mime et je les ai tous retrouvé Il y'avait le mime, le pendu, la statue et le fils du soldat inconnu Ils m'ont donné l'impression de disparaître dans la pierre Et puis je les ai revu à environ 5 km de moi, au bord du précipice ils regardaient leur future destination J'ai cru un moment qu'ils allaient me faire un signe mais ils ont de nouveau disparu J'ai alors su que je ne les reverrai plus jamais Il n'y avait plus que mon film… J'ai alors décidé de me rendre chez le vieil homme Il n'était plus là et le désert reprenait la cabane Bien entendu j'ai fait celui qui n'était pas surpris alors je me suis filmé en train de nettoyer la voiture et puis j'ai eu envie de me filmer jusqu'à la dernière image pour me ra**urer Le soleil se couche, je suis trop fatigué pour rejoindre la ville Je vais pa**er la nuit dans la cabane du vieil homme Je ne trouve pas le sommeil. Je décide alors d'accrocher le drap sur un mur et de projeter mon film Je revois la sortie de la ville, je souris quand le fils du soldat inconnu parle à ma voiture, il y'a le vieil homme, le chien, l'arc en ciel rouge, les silhouettes à peine visibles jusqu'au dernier plan où je lave ma voiture Et alors que j'allais éteindre ma caméra, je me vois sur le drap en train de mimer le pendu, la corde ne tient pas et en tombant sur le parquet mon corps se brise comme une statue