On a respiré cet air des montagnes arides Ce même air qu'aucune ville, qu'aucune cité n'abime On s'est délecté des mêmes larmes de vignes Et ressenti ce froid de septembre comme un signe On a enjambé les mêmes tas de pierres chauffées Par les rayons rasants d'un soleil attardé On a cueilli le même fruit noir d'un olivier Dont le bois torturé masque à peine les années On a regardé défiler les mêmes nuages Prié pour voir la pluie quand ils prenaient le large On a accouru aux mêmes appels de nos mères Ponctuant nos journées par des dîners austères {Refrain:} J'ai voulu te connaître, t'aimer, te visiter Tu me semblais si proche quand j'ai tendu la main À force de promettre, tout ça s'est dissipé Les traits de ton visage m'ont paru si lointains On a martelé les mêmes chemins poussiéreux Mesuré le poids de la vie au dos des vieux Dévalé les mêmes pentes sur des chars archaïques Les mêmes colliers de fer aux figues de Barbarie On a caressé les mêmes plantes odorantes Projeté les mêmes branches en pâture aux torrents En silence dans nos chambres les mêmes yeux qui scintillent Pensaient aux fleurs qui touchent le cœur des mêmes filles Sur un bureau d'école les mots venaient se perdre Sur un papier froissé ses lèvres cachaient des perles Et tant d'années après, l'amour porté en terre Les pleurs de celui qui reste caressent les mêmes pierres {au Refrain} On a parcouru les mêmes rivages, ironie ! Ce sable fin où s'échouent les posidonies Où les mouettes poussent les cris d'un monde libre Dont les frêles frontières n'existent que dans les livres On a rêvé les mêmes conquêtes et aventures Les soirs d'été, a**is sous les mêmes tentures Dans ces draps apaisant les morsures du soleil J'ai accosté l'Europe au cours de mon sommeil Le voyage fut dur et j'en garde les marques Le cœur serré pour mes frères partis sur ces barques Car l'eau de notre mer qui, un jour, te sourit À tes pieds le lendemain peut venir pour mourir {au Refrain}