Je meurs avec humour, je meurs modestement
Je n'ai même pas mis mes habits du dimanche
Je ne suis pas de ces pépés grincheux aigris
Je meurs sans prétention, je regarde la Loire
Couler devant chez moi avec des enfants nus
Le ciel avec dans l'œil son ultime hirondelle
Ainsi s'en va ma vie et mon sang qui s'endort
Restent les grands oiseaux qui dorment sous les feuilles
Restent vos longs cheveux et le soleil dans l'eau
La la la…
On vit on ne sait quoi, on ne sait pas comment
Je ne sais pas pourquoi, je ne sais pas encore
J'ai eu mon âge d'homme, un matin par hasard
J'ai vendu ma jeunesse à un jongleur de foire
Je sentais tous mes jours percés d'air et d'oiseaux
Ma vie en moi, mon sang comme une certitude
Ma vie comme une dent qui mangeait de la mort
Un grand bonheur idiot qui s'emmêlait les ailes
Voilà le pont qui claque et la drague qui geint
La la la…
J'ai tant aimé la vie, je m'en voudrais un peu
De me mettre à genoux pour lui lécher les bottes
Je m'éloigne de l'eau, je m'en vais, tout est bien
J'oublie même d'organiser mes chrysanthèmes
À mon mariage aussi j'ai été en retard
Et en cachette je te caressais les fesses
Elle est morte avant moi, c'est tant pis, c'est très bien
Je m'efface à mon tour, sans discours, sans supplique
Laissons les immortelles nous parler de la mort
La la la…
Je m'en fous de ma mort, du marbre et des fleurs
Je vis encore et je ne veux pas qu'on en parle
J'entends le pas pointu des femmes sur le quai
Je les suis, je les veux, c'est toi et je t'épouse
Il fait chaud et la Loire s'étire et s'étend
J'ai bien roulé à gauche aussi du temps des fraises
La bouche ensalivée je vais où je m'endors
J'ai vécu ma vie pleine comme une écriture
Et la dernière phrase n'est pas écrite encore
Il est très tard ce soir et je suis seul, je rêve