Ô cimetière des théâtres morts
Où le vent tourne et gronde mais pour rien
Où le vent mord
Où le monde se jette d'un dernier mensonge dans la mer
Et toute réalité mue en vers
Et tout le texte du monde en vent vert
Ô cimetière des théâtres morts
Où cent théâtres sont échoués et démâtés et seuls
Et pourrissant de voiles de gréements dans le vent veule
Dans le vent du nord
Les fauteuils ensablés ressemblent à des tombes
Où des noyés alignent leurs visages de gisants
Rien qui s'émeuve, rien qui vive, rien qui vaille aucune peine
Que des mouettes sur la grève perdue loin
Ni traître au couteau ni blonde non plus qui se tordait les mains
Ils ne paraîtront pas pour l'ultime rappel
Au bord des mondes
Rien que l'infinie prosodie des vagues veuves tremblera
Un gardien sourd et muet y attend que revienne
La jeune fille aux lèvres mauves et aux yeux verts
Qu'on refusa pour je ne sais quel rôle pourtant secondaire
Et qui s'éloigna pauvrement se punissant de n'être pas celle qu'on aime
Mais qui d'un geste fit tomber la rose des vents dans la mer