La nuit tombée, la vieille dame du cinquième
Cri des cigarettes à son balcon d'ébène
Dix mètre carrés, que tolère, depuis des années
Son agoraphobie sévère
Et de là haut, du regard, elle embrace
En secret la vie
Des amants d'en face
Elle s'invente, une vie parallèle
Souriant, les yeux dans une paire de jumelles
Sans connaître leurs noms
Elle préfère l'anonyme de ses relations
Par delà les buildings
Et les années pa**ent et la voyeuse s'inquiète
Plus d'ombres chinoises, de buer dans les fenêtres
Dans la chambre les amants s'aime à dormir debout
Il est loin le temps des nuits blanches éperdues
C'est la déconfiture des amants
Ceux qui font chambre apart
Et c'est le calme plat sur l'échelle de Richter
Sous un même toît de solitude parallèle
Dans l'anonymat, rêve de grandiose et charnelle
Mais cette nuit, des avions ont la trajectoire
L'édredon des voisins, comme aérogare
Des pliages en papier de rendez-vous secret
Des poèmes que seul Gardin écriraient
Demain, minuit tapant, sur le toît du building
"Moi je t'y atteint", signé anonyme
La nuit tombée, dans leurs plus beaux habits
Les amants se retrouvent sans comprendre la duperie
Sur le toît d'un gratte-ciel, on voit la lueur
De leurs fiancailles, comme ça à ciel ouvert
La nuit aquarellée porte leurs retrouvailles
Et la veille dame sourit
Les yeux dans ses jumelles