Du temps que je vivais dans le troisième dessous
Ivrogne, immonde, infâme
Un plus soûlaud que moi, contre un' pièce de cent sous
M'avait vendu sa femme
Quand je l'eus mise au lit, quand je voulus l'étrenner
Quand je fis voler sa jupe
Il m'apparut alors que j'avais été berné
Dans un marché de dupe
Remballe tes os, ma mie, et garde tes appas
Tu es bien trop maigrelette
Je suis un bon vivant, ça ne me concerne pas
D'étreindre des squelettes
Retourne à ton mari, qu'il garde les cent sous
Je n'en fais pas une affaire
Mais elle me répondit, le regard en dessous
C'est vous que je préfère
Je suis pas bien grosse, fit-elle, d'une voix qui se noue
Mais ce n'est pas ma faute
Alors, moi, tout ému, je la pris sur mes genoux
Pour lui compter les côtes
Toi que j'ai payé cent sous, dis-moi quel est ton nom
Ton petit nom de baptême?
Je m'appelle Ninette. Eh bien, pauvre Ninon
Console-toi, je t'aime
Et ce brave sac d'os dont je n'avais pas voulu
Même pour une thune
M'est entré dans le cœur et n'en sortirait plus
Pour toute une fortune
Du temps que je vivais dans le troisième dessous,
Ivrogne, immonde, infâme
Un plus soûlaud que moi, contre un' pièce de cent sous
M'avait vendu sa femme