Il voulait quitter la routine, celle de son père Qui étiole les rêves au large des paupières Enfourcher son vélo, repartir à zéro Petit gone de Lyon aux oripeaux d'évasion Partir! Non pas pour voir de nouveaux lieux Mais voyager, pour ouvrir de nouveaux yeux Orpailleurs d'horizons, y'a que des hôtels mille étoiles Pour les clochards célestes qui ne s'embarra**ent pas d'un toit Petit croissant au beurre, petit français qui flâne Il lisait Kerouac et chantait Bob Dylan Il est parti un matin vivre à la dure Rencontrer les humains, épouser la nature Et de pays en pays, il pédale, il pédale S'est usé par la route d'un voyage de cinq ans Qu'au bord de son doute il rencontre un piment Elle était belle comme un piment, une robe du dimanche Elle rêvait d'un charmant, d'un amour qui s'épanche Elle vivait dans un quartier populaire Elle avait fui son pays, les pogroms et la guerre Et la terre des ancêtres était un vaste mouroir Et ce pays d'accueil, un sombre miroir Qui lui renvoyait cette image de paria Une réfugiée HCR qui glisse aux parois Et qui veut s'envoler, partir loin d'ici
Là où le ciel ne dit ni Hutu ni Tutsi Et puis les murs de sa chambre au vert papier peint Recouvert de poster de «Salut les Copains» Etait son antre où elle rêvait d'être hippie D'écouter du Jimmy et de vivre à Paris Et c'est en attendant le bus sous un arbre en fleur Qu'elle a croisé son destin à celui d'un croissant au beurre Elle et île aux Sources du Nil Un vent souffle l'idylle sur les branches d'un nid D'un croissant beurré et d'un piment swahili Qui s'étaient donc jurés de s'aimer pour la vie Malgré toutes les routes crevées d'ornières Dans le panache de poussières des saisons blanches et sèches Malgré le doute et les pluies diluviennes Malgré les torrents de boue qui s'écoulent dans la plaine Le croissant, le piment ont le goût d'un enfant Puis de un puis de deux, carpe diem d'un instant Aucune écluse ne peut contenir les rêves Que le cœur transporte et pour lesquels il crève Pili-Pili rêvait de Paris Croissant au beurre voulait vivre ici Ils se croisent, se décroisent les chemins Et laissent des enfants au carrefour des destins