Vingt kilomètres avant la frontière, j´avais tant marché,
Je n´en pouvais plus.
Je ne ramenais que la poussière, collant à mes bottes
Aux semelles usées.
Qu´est-ce que ça veut dire vingt ans si tu crèves
Devant un désert de portes fermées?
Qu´est-ce que ça veut dire si tu n´as pour rêve
Rien que ta folie, de vouloir chanter?
Victor, Monsieur Victor, vous aviez un drôle d´air
Quand vous avez stoppé, je n´avais pas confiance.
Pourtant, je suis montée dans votre coupé Chrysler,
Ce jour-là, Monsieur Victor, sur la route du nord.
Vous n´étiez pas de ceux qui posent des questions,
Avec vos tatouages, jusqu´aux oreilles.
Vous aviez l´air d´un drôle de cinéma,
En croco diamant, sous ce chapeau.
Vous m´avez dit : "Je suis trafiquant de voitures.
On contournera la frontière."
Peur de rien, j´avais la folie de chanter
Paris était loin, je n´en pouvais plus.
Victor, Monsieur Victor, je me souviens encore
De cette auberge et du café chaud.
Victor, Monsieur Victor, vous aviez un cœur d´or,
Pour moi, ce jour-là, sur la route du nord.
Il faisait presque nuit, j´avais beaucoup parlé.
Paris n´était plus loin, j´avais le cœur serré
Quand vous avez stoppé votre coupé Chrysler
Porte de la Villette, vous aviez un drôle d´air.
Vous m´avez dit : "Chanter, c´est pas un métier.
Pour faire l’artiste, il faut des connaissances.
Victor connaît la vie, tu peux lui faire confiance.
Laisse-moi m´occuper de toi. T´auras plus jamais faim."
Victor, Monsieur Victor, j’aurais dit oui peut-être
Mais j´avais en moi la folie de chanter.
Victor, Monsieur Victor, vous aviez un cœur d’or
Pour moi ce jour-là, sur la route du Nord.
Victor, oh Victor, j'ai changé de décor.
Je chante, maintenant, sur les routes de partout.
Pourtant, Monsieur Victor je n´ai pas oublié
Ce café chaud, sur la route du nord.
Monsieur Victor, vous aviez un cœur d´or