D'abord le souvenir d'un cousin Qui se noie dans l'eau d'un ba**in De la vase plein les manches Et j'ai six ans. Dans la Simca noire Sur la plage arrière comme un loir Je dors la tête sur la manche J'ai la mémoire qui planche Je nous revois, même trombine Enfants de la même farine Un seul pain dont on fait six tranches En pyjamas devant la grille Prêts pour la photo de famille Un Kodak un doigt qui déclenche J'ai la mémoire qui planche Il y a des soutanes noires De la purée au réfectoire J'ai peur du lundi dès dimanche Les jeudis sont des mercredis Il y a des copains, des copies Il y a déjà des feuilles blanches J'ai la mémoire qui planche Une barque glisse dans la lône Je pêche au filet sur le Rhône Et les rames s'accrochent aux branches Vingt-cinq kilos tout habillé Un mètre trente déplié Voir duquel côté la vie penche J'ai la mémoire qui planche
Il y a un tas d'anarchos Jurant d'abattre Franco Au cani chez les Espanches Là je sors la tête de l'eau Entre cafés et diabolos Et chacun remet sa tournanche J'ai la mémoire qui planche Ta silhouette de baudruche Ta robe comme une capuche Comme un chapeau melon étanche Tes respirations de caniche Nos petits sortent de ta niche La vie qui coule entre tes hanches J'ai la mémoire qui planche Je fais aiguiseur de couteaux Le temps s'arrête avec Django Je roule pour les Romanches Ils ont des chevaux plein la tête Et dans leurs mains plein de serpettes Ils sont pas du côté du manche J'ai la mémoire qui planche Je sers un dernier repas Je serre le pied de papa Juste avant qu'il ne calanche Je prends le bateau à l'envers Je démaille mon pull-over Jersey, jusqu'au bout de la Manche J'ai la mémoire qui planche