Écoute-moi, listen to me, ascoltame, Lazare
Quand les pendules sonneront leurs voix stellaires
Et que les boulevards traîneront plus par terre
Tu pourras te lever dans ce siècle bizarre
Moi qui vendais des Paris-Soir à Babylone
Quand les avions à réaction avaient des plumes
Et gueulaient des chants doux comme un concert de brume
Sur cet Orient avec leurs gorges microphones
Tant que j'aurai le souffle et l'encre dans ma rue
Et que le vent du Nord ouvrira mes éponges
Il régnera chez moi comme une mer têtue
Qui me tiendra la main à la marée des songes
Qui dira la pa**ion du Corton à la messe
Cette rouge chanson plus rouge que le sang ?
Qui dira la virginité de nos caresses
Quand il y pa**erait Jésus entre nos dents ?
Rien n'est beau qu'un matin laïc dans la brume
Alors que le soleil est encore au dortoir
Et que la gaze dans la plaine se consume
Comme un rictus d'encens quand s'ébroue l'encensoir
Je vis, dès aujourd'hui je suis mort dans la cire
Ma voix microsillonne une terre ignorée
On me lit n'importe où à l'heure du délire
À l'ombre d'un juke-box où bourgeonnent des fées
Dans l'azur en prison vautré sous la mémoire
Maldoror d'une main et Sade dans le froc
Je suis en or galvanoplaste et je m'égare
Sous la tête diamant d'un phonographe toc
Ma voix dans quelque temps sous la lune en plastique
Quand ma carca**e présumée aura fané
Et que des Roméo sur les places publiques
Tendront complaisamment leur perche aux chats nichés
Ma voix les bercera dans des berceaux de pa**e
Niche-toi, mon copain, et perches-y ton bouc
Moi, le berger perdu qui renifle la trace
De mes brebis rasées de frais pour le new-look
La vie est un chaland où meurent des rengaines
Les larmes sont les flots, la peine le roulis
Quelquefois le bonheur invente des misaines
À ce rafiot qui s'envoilure alors et plie