C'est au même instant qu'ils poussèrent tous les deux leur premier hurlement
L'un, tout précis bien tranquillement fit son apparition au milieu des visages bienveillants
D'hommes et de femmes en blanc et de deux parents impatients pour fêter l'évènement
De faire ripaille
Mais l'autre vint au monde dans une grange sur la paille quelque part dans un pays d'Asie bien lointain
Où l'on mange le riz comme ici le pain
Son premier cri on l'étouffa pour ne pas attirer les soldats
C'était ainsi, aucun des deux petits n'avaient choisi son numéro dans la grande loterie de la vie
Le premier serait prince, aurait le droit de vivre comme un roi
Le second serait pauvre jusqu'à l'heure de son trépas
Un an pa**a et puis il y eu une fête princière, un premier anniversaire
Sous le regard tendre d'un père, d'une mère émus et fiers
De voir leur enfant grandir, lutter maladroitement à cet instant
Pour éteindre une première bougie, c'était touchant
Chez le pauvre ce soir-là c'était un autre combat, celui de tout un village meurtri
Qui tentait en vain de vaincre un gigantesque incendie
D'origine certes pas naturelle mais parachuté du ciel
Dans des colis de mort largués depuis de sinistres appareils
Volants, qui ne faisaient jamais dans le détail
Vus d'avions, forêts, villages, humains, bétail, c'était pareil
Il y eu l'âge, des premières corrections, que le petit prince soit a**ez sage
Pour [?] les yeux inondés de larmes, larmes que le pauvre ne put retenir quand sous ses yeux innocents
On fit de ses parents deux martyrs
[Refrain] × 4
Ils étaient pourtant tous les deux nés sur la même terre
Le pire c'était l'école, des devoirs, de l'histoire, des maths, de la grammaire
A ne savoir qu'en faire
Quand le réveil du prince sonnait c'était l'enfer
Il n'en aurait pas fait toute une affaire
Si il avait appris qu'entendre le chant du coq après la nuit
Signifiait pour le petit pauvre qu'il était encore en vie
Et dans son pays, beaucoup comme lui auraient tout, tout donné
Pour pouvoir se reposer sur un banc d'école
N'avoir rien d'autre à faire qu'étudier
Plutôt que d'avoir à rapporter le pain quotidien
Plutôt que d'avoir à travailler au jour de leurs petites mains
Fragiles
Plutôt que d'avoir à être agiles
Pour courir vite, éviter de devenir des cibles trop faciles
Plutôt que d'avoir aussi souvent à jouer à cache-cache
Dans la pénombre, en attendant patiemment, la fin des pluies de bombes
Ces jeux-là, ça existait pour de vrai
Mais allez savoir pourquoi la maîtresse d'école du prince n'en parlait jamais
Y'avait même pas de quoi faire des cauchemars
Quand elle racontait la guerre c'était toujours tout blanc tout noir
Des gentils des méchants dans les livres d'histoire
Pourtant le pauvre voyait toujours défiler des hommes en uniforme
Mais c'était jamais les mêmes
Il ne savait même pas qui faisait quoi, pourquoi on se battait, et à vrai dire il s'en moquait
Y'avait les bombes qui tombaient, les tombes qui s'enta**aient
Personne ne connaissait le mot paix, jamais
Et c'était toujours dans son village qu'on brûlait, qu'on pillait, qu'on torturait, qu'on prenait les otages
[Refrain] × 4
Voilà les deux histoires somme toute bien ordinaires
De deux êtres que tout aura toujours opposés
L'un avait le superflu en plus du nécessaire
Un toit, des droits, pourtant il se plaignait parfois
L'autre considérait la vie comme un don du ciel
La souffrance comme une épreuve, il la prenait comme telle
Il vivait, imprudemment, au présent
Savourait chaque instant de répit, était finalement plus sage
Que le roi et même plus heureux peut-être, en tout cas
Il aurait vingt-deux ans aujourd'hui
Le dernière balle qu'il a fui allait trop vite pour lui
Et elle est venue se perdre dans un recoin de son crâne (paix à son âme)
Puisse-t-elle trouver là où elle est le repos qu'elle mérite
Moi je pleure à sa mémoire car même si [?] je retournerai à la terre
Mon voyage ici bas aura eu un tout autre visage
Oui il faut que je confesse que je suis ce prince
Sans titre de noblesse mais à l'existence bénie
Né dans un pays de c**agne et même si vraiment, tout n'est pas rose ici
J'ai grandi dans un paradis sur terre, à l'abri, bien loin des flammes de l'enfer
Je n'ai rien choisi je ne suis coupable de rien
Par contre je devrais mourir de honte chaque fois que je me plains
Car elle est loin l'idée de la mort quand je me lamente sur mon sort, alors
Que tous les soirs comme un bienheureux je m'endors