Nous sommes allés, aveuglés par le soleil d'hiver Dans ce cimetière minuscule au milieu de l'hiver Avec quelques tombes blanches perdues dans la verdure de l'hiver Nous n'étions qu'une ponctuation de l'espace immense Égarés dans un film bizarrement surexposé Qui saute sans cesse et la scène recommence Et le rituel dérisoire continu qui nous est imposé Les musiciens, les doigts absents, jouaient la musique de ton royaume Ton royaume, mon pauvre ami, de toutes ses forces arc-bouté Ils jouaient, comme pour dire à Dieu "Nous sommes restés fiers" Ils jouaient, chacun dans sa terreur se forgeait des répliques Contre l'impitoyable qui court bien plus vite que nous Un cheval qui, sans doute, était un cousin de la morte Nous observait et mangeait l'herbe verte En nous donnant, mine de rien, des leçons de tendresse Je ne ramène pas de mots de cette virée dans la tristesse aveuglante Qui est la plus proche du soleil
Camarade des camarades, je suis revenu vides les mains Pa**ée la porte de métal et d'air où nous avons l'autre jour accroché nos doigts Si tu trouves des mots, c'est que tu ne reviendras pas Et moi je te le dis pour les vivants, les tiens, les miens, tous ceux que j'aime J'ai peur de cette beauté-là qui dans le pare-brise vient L'autre jour c'était moi qu'on mettait en terre et je me regardais n'être plus rien Je dis "Tu as mon amitié. C'est un appel à l'aide." Je saigne dans ce carrefour des cent mille routes. J'ai peur. Oh, s'il se peut: Que quelqu'un me tire en arrière Seulement d'un quart de seconde pour soulager le cœur J'entends le souffle déjà du chevelu cheval Il me dit qu'il faut me réconcilier une bonne fois avec la Terre Et me préparer à disperser ma conscience dans la Terre Réconcilié avec la Terre Et sa respiration qui est le chant