Les grands châteaux abandonnés
À la lourde grille hors d'usage
S'effondrent comme des visages
Avec les années
Y rodent des âmes damnées
Fantômes gris sur des dallages
Sous de hauts plafonds, fous de rage
À tout jamais enfermés
Princes jadis si arrogants
Barons de la banque, baronnes
Fripons, escrocs, voyous, friponnes
Par nous haïs si justement
Que faisiez-vous de votre ennui
Si entre vous seuls, si vomis
Par nous, par moi, par toute l'engeance
Qui grinçait dans ses dents "Vengeance!"?
Comme on doit vraiment se morfondre
Quand on ne peut se mélanger
Qu'à vivre il y a trop de danger
Le vulgaire, la sueur, le nombre...
Tant de ba**esses, l'entregent
Tous ces meurtres, tant de saccages
Pour le pouvoir, le cul, l'argent
Pour enfin le commun naufrage
Les grands châteaux abandonnés
Où vous vous gardiez comme en cage
Se délabrent sous les outrages
Du temps, la haine, les huées
Y a-t-il un repos pour eux
Au paradis des paysages?
Un purgatoire en raison de
Leur si grand âge?
Ah, grands gosses dégingandés
Autant vous fûtes détestables
Autant vous voilà pitoyables
Implorant notre humanité
Vous venez manger dans nos mains
Comme de bons gros chiens stupides
Vous quémandez quelques subsides
Pour la toiture, le jardin
Châteaux, châteaux qui dérivez
Dans les pages de notre Histoire
Si absurdes, si familiers
Perclus de douleurs dérisoires
Craignez pas qu'un jour on vous ca**e
Ou craignez pas qu'on vous oublie
On ne vous en veut plus, nenni
On vous cla**e et grand bien nous fa**e
Vous n'êtes plus que décors vains
Cabots implorant qu'on vous aime
Pas rancuniers, nous, trop humains
On vous commente, on vous repeint
Pas de problème!