On entre dans Madrid et Madrid est soumise À genoux l'Espagnol qui baise les parvis Pourtant il y avait du sang sur ces chemises Qui sèchent à Madrid en travers du ciel gris On entre dans Madrid et Madrid est stérile Le silence a gagné sur l'écho des tambours Lorsque le sang des morts n'est pas indélébile Il suffit de la pluie sur le pavé des cours Bénis soient les canons, les brèches sont ouvertes Il fleurit l'évangile, il fleurit le lilas Ce lilas dont on sait vos épaules couvertes Vous, monseigneur Dias, évêque de Gomorra Est-ce le jour qui point, est-ce Madrid qui brûle Madrid a-t-elle encore quelque chose à brûler? On fusille peut-être à l'aube des cellules L'incendie qui s'éteint rallume des bûchers Moi qui n'ai que vingt ans, que veux-tu que j'en sache
Sinon ce morne oubli, sinon cette rumeur Et ces corps étendus offerts à la cravache Lorsque les rues du soir se gonflent de dormeurs Bénis soient les canons, les cloches carillonnent On voit pa**er partout des Jésus en haillons Sur leurs têtes s'étoile en guise de couronne Le barbelé tressé qui leur saigne le front On entre dans Madrid, Madrid est famélique Il faut survivre, flic, ou bien prendre l'habit Le peuple-roi devient le peuple domestique Le peuple à deux genoux polit les crucifix Bénis soient les canons, les brèches sont ouvertes Ouvertes entre les rues d'où s'échappe un gamin Pourquoi pas celui-là qui donnera l'alerte Et qui naît à Madrid pauvre et républicain