La vaisselle étant lavée
la lune s'est levée
sur la chanson sale des fonds de cour
quand le vin est ciré le plancher est glissant
corde à linges et grandes combines
mauvaises herbes dans nos lits doubles
les cargaisons coulent et tu surnages ô mon pays
entre deux épaves et quatre pitounes
dans le mazout teinté d'oubli
lèvres gercées par l'hiver
craquelures du grand âge aux mains des vieux
qui de nous te verra plaine morbide
enfin lavée comme une grève un soir de vent
dans les grincements de huards
au large de Champlains
les bouées tournent et puis s'éteignent
ainsi la gueule baveuse des chiens que nous sommes
éperdus de mots cherchant à dire
non pas des secrets ni des mystères
mais bien pourquoi puant pays de mes amours
on t'aime encore et pour toujours
mauvais cadeau plus qu'inutile
grinenaude au fond de l'histoire oubliée
j'entends les cris des poubelles ô lundi soir
fumier des temps humides
vaches à peine vêlées
collets de tous nos draffes
notre pa**é de communiants
mon doigt coupé tombe encore
dans le néant de mes onze ans
tandis qu'à vingt d'un pays je fus nanti
à la fois la terre et la charrue
à la fois son trottoir et le pa**ant
et d'autant plus triste et débordé
le pays que je travaille pour est un câlice un enfant de
chienne de nous maudire icitte sans une bougrine sans un ancêtre
sinon nous-mêmes hostie d'humus
ma jeunesse a crissé le camp comme un voleur
emportant tout sinon des dettes et des ca**ures à réparer
sémantique du blasphème et de l'injure
rien d'autre n'avons-nous sinon perclus au fond des tripes
entêté jappant sans cesse le cri bêlant d'un pays à naître