Derrière le parking qu'est désert la nuit,
A côté de la voie ferrée dans une impa**e étroite,
Il y a un p'tit bar au papier peint jaunâtre, papier peint jaunâtre,
Le vin pique la gorge et le pain des sandwiches
Est plus mou qu'une éponge, bien plus mou qu'une éponge
C'est pas un bel endroit mais ça suffit pour boire
Un canon, deux canons avant d'aller se coucher
Tous les vendredi soir à peu prêt vers 7 heures,
On l'entend arriver déjà depuis le parking,
Il fait voler la porte et il entre en hurlant:
" Salut la compagnie, salut la compagnie "
Avec les yeux gonflés sur sa gueule de clochard,
Cicatrice au menton, mouchoir comme un foulard,
Il s'appuie au comptoir pis il commence à boire
En racontant une histoire,
Celle du loup dans la bergerie,
Celle du missionnaire dans la blanchisserie
Il a vu toute la terre, il a fait tous les pays
Il dit qu'il a été légionnaire alors on l'appelle comme ça,
On dit " Tiens t'as vu l'légionnaire "
Il dit pas l'Indochine, il dit qu'il a fait l'Indo, pis aussi l'Algérie
Il raconte que sa vie, toujours la même histoire, son histoire,
Celle du loup dans la bergerie,
Celle du missionnaire accroupi dans son lit
Quand il est saoul, encore un peu plus saoul, il se goure, il mélange tout,
Dans sa voix éraillée, il se met à brailler, en faisant le tour des tables
Il veut vendre des poèmes qu'il a écrit lui même,
Sur des feuilles de papier mal ronéotypées
Et ça raconte encore toujours la même histoire,
Celle du loup de la troisième dynastie
Qui mange un missionnaire accroupi tout gris dans une blanchisserie,
A côté de la grande bergerie
On y comprend que dalle,
Mais ça fait rigoler tous les buveurs fatigués en sortant du boulot,
Et même si on se fout de lui, on lui paie une tournée
Pour qu'il raconte encore et encore
L'histoire du loup dans la bergerie
Celle du missionnaire ébloui.