Quand, un jour, le pauvre Pierre
Comprit qu'il ne vivrait pas
Tout seul avec ses chimères
Dans sa chambre, il s'enferma
Que laisserai-je à ma mère
Qui m'a déjà si peu vu?
Que laisserai-je à mon père
Pour m'avoir si fort tenu?
Pauvre Pierre, ta misère
C'est ton cœur qui l'a voulue
Que laisserai-je à mes frères
Pour preuve que j'ai vécu?
Preuve qu'il y a sur Terre
Des richesses inconnues
Il y a tant de merveilles
Dans ma tête et dans mon cœur
Je n'ai plus ni temps ni veille
Pour les verser dans les leurs
Pauvre Pierre, ta misère
Ne doit pas te faire peur
Cependant qu'il se lamente
Une fille l'entendit
Ni très belle ni amante
Simple et douce, à ce qu'on dit
Console-toi, pauvre Pierre
Elle lui ouvrit son corps
Au matin, dans la lumière
Elle se sauva dehors
Pauvre Pierre, ta misère
Recule, tu vis encore
Quand enfin le pauvre Pierre
Vint à peser sur son lit
Moins qu'une poignée de terre
La fille revint vers lui:
Pierre, ne perds pas courage
Car j'ai là, au fond de moi
Dans mon ventre, l'héritage
Que tu laisseras de toi
Pauvre Pierre, ta misère
N'est pas si grande, tu vois
Je porterai à ta mère
Cet enfant de toi reçu
Le donnerai à ton père
Disant que tu l'as voulu
Il montrera à tes frères
Que tu as aimé la vie
En l'entendant, pauvre Pierre
Juste avant la fin sourit
Pauvre Pierre, ta misère
N'est plus si grande aujourd'hui
Pauvre Pierre, sous la terre
Dans cet enfant, tu revis